MADAME HEMINGWAY de Paula McLain


madame hemingway couvCe livre est un roman sur le premier mariage d’Ernest Hemingway avec Hadley Richardson.  Paula Mclain s’est servie de plusieurs biographies et autres correspondances sur cette période « parisienne » d’Hemingway.

Livre écrit à la première personne avec la voix d’Hadley et quelques chapitres en italiques imputés à Hemingway, pour rejoindre le propos d’Hadley. Les cent premières pages sont consacrées à la rencontre entre Hadley, 28 ans et le jeune Ernest de huit ans son cadet. Elle est une jeune fille au sens propre du terme, élevée de façon  « victorienne », elle est encore vierge la veille de son mariage en 1921. Elle sort, elle fume, elle boit beaucoup comme les « flappers » de son époque, libérée en apparence (et par opposition à la génération précédente), mais c’est tout. Pour le reste, elle est soumise à l’homme qu’elle aime, soucieuse des conventions (même si elles sont malmenées par son époux) et malgré tout, très conservatrice. Hadley a les pieds sur terre, elle semble invincible, elle est « réelle » comme se plaît à le dire son mari.

Elle comprend très vite qu’il lui faut se sacrifier pour laisser le talent d’Ernest s’envoler. Il n’est que journaliste, mais aspire de toutes ses forces à devenir un grand écrivain. Elle le suit à Paris, où leurs rencontres avec Gertrude Stein et Ezra Pound vont être un début de reconnaissance même si après avoir lu une nouvelle d’Ernest, Gertrude Stein lui rend son papier en lui conseillant d' »aller à l’essentiel« …. Ils sont fauchés, mais  sont invités, boivent énormément et continuent à rencontrer du beau monde tels que James Joyce et ses nombreux « enfants », Fitzgerald et sa femme, Zelda. Cette dernière, dès la première rencontre fera dire à Ernest : « Elle est cinglée« . Il ne lira pas Gatsby le Magnifique offert par Fitz, c’est Hadley qui lit Fitzgerald…avant lui. D’ailleurs, ayant lu énormément sur Zelda et sur le couple, je peux affirmer qu’Hemingway et Fitz se sont vus beaucoup plus que dit dans ce livre et que Fitz a beaucoup oeuvré (et écrit) pour « lancer » Hemingway (Voir Lettres à Zelda et autres correspondances-Gallimard).

 Hadley a un regard lucide sur les gens qu’ils croisent, sur Ernest encore fragilisé par une blessure et les cauchemars récurrents qu’il fait de la Guerre mais elle a cette phrase dès le départ qui résume parfaitement leur mariage : « Découvrir la faille dans cette façon de voir allait être la leçon la plus dure de mon mariage. Il y avait certains aspects d’Ernest qui m’échappaient et il ne désirait pas que j’y accède (…). Mais il aimait aussi pouvoir s’évader dans son travail, loin de moi. Et revenir quand il l’avait décidé » (p.103). Seulement voilà, il a « besoin d’elle », ils sillonnent l’Europe, vont en Autriche pour skier, à Pampelune pour les corridas qu’elle aime autant que lui, du moins tient-elle le choc,  ne serait-ce que pour qu’il soit fier d’elle : décevoir Ernest est la pire chose qui puisse arriver… Et occasionnellement, sur des périodes de quinze jours/un mois, pour son métier de reporter expatrié, il voyage seul.

Elle arrive,  en 1922, à lui faire un enfant, Bumby, pas vraiment désiré par Ernest qui tient sur un carnet, les cycles de fécondation de sa femme et pour qui l’erreur est impossible ! Mais il acceptera et s’intéressera à l’enfant  comme un homme le fait souvent à cette époque : de loin !

Après avoir été un époux relativement dévoué et prévenant, Hemingway se révèle très conservateur (et macho) quand ça l’arrange, surtout en ce qui concerne la place d’une femme (et surtout la sienne), mais beaucoup moins dès que des créatures exotiques s’intéressent à lui, même si Hadley fait barrage de toute son imposante certitude d’être celle qu’il faut à Ernest. On sait que le mariage a duré six ans, donc je ne vous raconterai pas la dernière partie du livre qui est aussi le making-off du célèbre livre « Le soleil se lève aussi ». Jusqu’où Ernest, beaucoup plus fantasque, doté d’un solide appétit (en tout) va-t-il résister aux femmes légères, jolies qui gravitent autour d’eux ? Où s’en vont les promesses du début quand le succès pointe son nez et qu’il semble plus approprié de ne pas être encombré d’une épouse vieillissante et d’un enfant en bas âge ?

Nous découvrons aussi les lieux mythiques où se sont écrites beaucoup de pages des auteurs de cette génération : Montparnasse et La Rotonde, le cinquième arrondissement (et la rue du Cardinal Lemoine) qui était encore un quartier populaire, La Closerie des Lilas…. Un livre doux-amer sur la Génération perdue mais aussi celui d’une femme amoureuse, à cheval sur deux époques, écartelée entre ses valeurs, son amour et la vie que lui impose son mariage. Trop sincère, trop « réelle » pour se perdre dans les chimères et le mensonge. Je ne dirai pas que sans elle, Hemingway n’y serait pas arrivé mais elle lui a donné un sacré coup de main et elle a compté tout au long de sa vie ! Pour ceux qui veulent en savoir plus sur la vie de cette époque « avec toute sa violence, son chaos et son étrange beauté » (p. 308),  sur les artistes qui lui ont donné son nom, à lire sans modération !hemingway mariage 1921

Mariage de Hadley et Ernest – Septembre 1921.

Merci au Livre De Poche pour ce partenariat !logo ldp

janvier 2013 – 500 pages.

Vous pouvez lire les billets d’Aifelle, de Liligalipette , de Mango et Missbouquinaix.

Une participation à mon challenge Fitzgerald et contemporains, une première au Challenge « Paris » de Sharon. Il est sélectionné pour le Prix des Lecteurs 2013 du LDP, mais n’a pas encore de Prix…

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64 réflexions au sujet de « MADAME HEMINGWAY de Paula McLain »

    • Ha mais il l’est !! Pour le voyage dans le Paris de cette époque, il est même très vivant !!! Pour le challenge, tu as encore un an mais ce n’est pas une raison !!! 😆

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  1. Je l’ai acheté cet après-midi, je le lirai après « Paris est une fête ». Tu es moins élogieuse qu’Aifelle mais c’est sûrement parce que tu les connais tous tellement bien que tu traques la moindre petite erreur 😉

    • Sous les galets : je connais bien Fitzgerald et sa femme surtout (beaucoup moins Hemingway) et réduire ainsi les relations entre les deux à une seule phrase « elle est cinglée », sans qu’elle parle du rôle de Fitz auprès des éditeurs m’a semblé très réducteur ! Je ne traque pas mais ça m’a sauté aux yeux !!! 😆 J’ai Paris est une fête dans ma PAL, je vais m’y mettre !!!

  2. J’aimerais beaucoup le lire ! Euh… par contre il n’a pas encore le prix des lecteurs 2013, il est sélectionné et le jury des lecteurs choisira à la fin de l’année. C’est ça le principe de ce prix… désolée de casser tous tes efforts pour mettre ton joli logo !

    • Anne ta super bibliothèque ne l’a pas ??? Et oups pour le Prix, c’est écrit sur la couv’, je n’ai pas cherché plus loin, je ne suis pas spécialiste des Prix comme toi et j’aurai bien d’autres occasions pour mettre le logo !!! Je vais l’ôter avant d’induire tout le monde en erreur, merci Anne !!! 😀

    • Alex, moi non plus pour tout te dire ! Parce que c’est un contemporain de Fitzgerald, je ne peux l’éviter mais ses goûts musclés pour tout ce que je déteste ne me font pas approcher ses textes facilement… Mais ce livre, s’il ne l’a pas réhabilité à mes yeux, est très intéressant et se lit vraiment comme un bon roman ! 😀

    • Merci merci Syl !!! 😀 Je viens de le dire à Alex… Son entourage était beaucoup plus sympathique que lui ! Il faut quand même que je lise Paris est une fête, sur ma lancée et essayer de comprendre certaines choses…

    • Lili, au final oui mais j’ai eu du mal avec les cent premières pages qui à mon avis peuvent être un peu écrémées… Et je n’ai pas apprécié l’unique remarque sur Zelda mais bon tu t’en doutais ??? 🙂

    • Denis, il est tout à la gloire d’Hemingway qui pourtant, en dehors de son talent était infréquentable !!! 🙂 Sauf si on aime la boxe, la tauromachie et…picoler comme un soudard !!! 😆 Ici c’est sa femme qui parle et elle est plus modérée que moi, elle est surtout très amoureuse…

    • Yorlane, il est sorti en 2011 chez Buschet Chatel, il devrait être dans les bonnes bibliothèques !!! Je le prête à quelqu’un de ma famille, puis à une amie, ensuite il pourra aller chez toi si tu ne l’as pas trouvé ?

  3. C’est fou ce que tu donnes envie de lire ; toutes tes présentations me réjouissent. Je ne suis malheureusement pas une grande lectrice en tous cas pas très rapide. Cependant tous ces challenges me mettent l’eau à la bouche et je vais m’y essayer quand j’aurais vraiment compris tous les fonctionnements ; suis pas sûre de savoir faire des billets comme les tiens. Je me suis attaquée  » au soleil des Sforta » pas mal et déroutant en ce qui me concerne.
    Naissance de Noé jeudi 31 janvier et avec lui cela me fait 4 petits enfants ! un vrai bonheur !
    Lilousoleil

    • Lilou mais tu es encore dans Indésirables, qu’est-ce qui se passe ???
      Tu serais parfaitement capable de chroniquer un livre, écris-le sur papier au début si ça peut t’aider ! Il suffit juste d’en parler sans raconter la fin et parfois ce n’est pas facile…
      Pour les challenges, pareil, tu t’inscris en commentaires chez l’organisatrice du challenge, tu enregistres le Logo dans ta « bibliothèque d’images ». Tu les notes (éventuellement ) sur un carnet. Quand tu as fini ton livre, tu regardes dans quels challenges il entrent (des fois un livre compte pour plusieurs). Tu rédiges ton billet et à la fin, tu indiques le ou les challenges dans le(s)quel(s) le livre entre, tu mets le logo correspondant et tu mets le lien vers la page du blog qui organise le challenge (tu fais un copié-collé), ça va ? Tu as compris cette fois ??? Imprime cette réponse et relis-la doucement ! 😆
      Félicitations, tu es une mamy comblée !!! 😀 Bises

      • Coucou 😀 je t’ai tagguée hihihi 😆 (je préfère te prévenir car je sais que tu peux pas aller tous les jours partout 😉 )
        (ça va mieux mais j’ai encore le rhume, oui j’avais un rhume en plus, et la toux qui me fait mal, les oreilles qui bourdonnent, mais sinon ça va 😆 )
        Biiiiises 😉

          • Il n’y a pas un jour à l’école sans au moins quelques absents, ça n’arrête pas cet hiver… Il n’y a que mon mari qui n’est jamais malade ! 😀 J’espère que ton oeil va mieux quand même 😦
            Bises 😉

            • C’est la pleine saison de la grippe paraît-il, mieux vaut que je reste chez moi, je serais capable de la choper ! Mon oeil en est au même point, le problème c’est que personne ne comprend pourquoi (et moi non plus d’ailleurs), je le soigne sans arrêt, c’est tout ce qu’il me reste à faire ! 😉

    • Philisine, j’ai aimé bien que j’aie trouvé le début longuet mais comme après je ne l’ai pas lâché, j’en ai déduit que mes conditions de lecture du début n’avaient pas été idéales ! 😉 Je lui reproche juste une chose ou deux mais je suis tâtillone sur cette période donc ça ne compte pas vraiment !^^

      • Oui j’avais compris, mais je voulais dire qu’il fallait que je vide ma PAL avant d’acheter celui-là ^^ J’avais adoré « Pour qui sonne le glas » quand j’étais ado mais je n’ai rien lu d’autre ensuite. Bon, j’ai noté en tout cas !

    • Coralie, ce livre est relativement « gentil » avec Hemingway, disons qu’il est impartial mais je l’ai détesté quand même !!! (lui, pas le livre) ! 😆 J’irai lire ta chronique demain, là j’éteins les machines !!! Bonne soirée ou…bonne nuit ! 🙂

  4. Toujours eu un peu de mal avec cet homme là (comme individu, pas comme écrivain!). Devait avoir une haleine de chacal …………..Comment ça : je suis bassement matérielle ??? C’ est important, l’ haleine, non ??

    • Pierrot, oui pour l’haleine, j’y ai pensé moi aussi, mais comme ils buvaient ensemble la plupart du temps, bah disons que ça faisait partie du cadeau de mariage !!! C’est comme poiur l’ail, mouhaha !!! 😆

  5. L’air de rien tu livres un hommage aux femmes dans ton billet….bien entendu je n’ai pas lu cet auteur, qui sait peut être un jour. Ces jours ci rien…impossible de lire, trop crevé le soir….

    • MTG, comment ça l’air de rien ??? Derrière un grand homme il y a toujours une femme, c’est bien connu !!! 😀 Pour la lecture, j’avoue que je lis davantage le matin en me réveillant et l’après-midi que le soir en ce moment…

        • MTG, ouste !!! 🙄 Tu n’as pas honte de dire des choses pareilles ??? Le problème c’est qu’un jour ou l’autre, on sait ce que la femme a fait pour permettre à l’homme de rayonner et les « grands hommes » n’en sortent pas grandis !!! Pffff !

    • Ys, en 1920, le passage par Paris était obligatoire pour être reconnu en Amérique ! Mais ils n’avaient pas tous de l’argent, les Hemingway ont été de vrais « bohème » fauchés contrairement aux Fitzgerald qui étaient pleins aux as ! A lire, ne serait-ce que pour voir revivre, sous un angle différent ces lieux célèbres !

  6. Très beau billet ! Comme quoi, on peut être un écrivain génial et un rustre ! C’est pas comme toi dont la finesse de l’écriture n’a d’égale que la délicatesse de ta personne. Allez ! file rougir dans ta chambre ! 😉

    • So, mais oui je rougis et comme je suis déjà dans ma chambre ! Warf ! Hemingway (l’homme) ne sort pas grandi de ce livre malgré l’absence de parti pris de l’auteure… Je te le conseille ! 😉

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