NOS CHEVEUX BLANCHIRONT AVEC NOS YEUX de Thomas Vinau


Une lecture particulière, dont la forme déroute au départ mais les paragraphes tous aussi poétiques les uns que les autres constituent la trame et nous suivons un vrai roman ! Et quelle histoire !

Le narrateur, Walther,  voyage, il s’éloigne de Sally, sa compagne enceinte , ce que nous ne savons pas dès le début. Sa carte  improvisée (plus ou moins) de  voyage le mène aux confins du grand Nord de l’Europe glaciale à l’Espagne top chaude en passant par la Hollande.  Il rencontre des gens ordinaires qui deviennent extraordinaires sous sa plume magnifique.La première partie est axée sur le voyage et les lettres à Sally et la deuxième sur le retour au bercail auprès de sa douce qui a attendu patiemment, comme une évidence.. et de leur enfant qui est né.

Malgré ce départ en solitaire, on comprend très vite que Sally, celle qui a su rester à quai,  est l’alpha et l’oméga de ce voyage initiatique sans vraiment l’être car il trouvera des réponses à des questions qu’il ne s’était pas posé initialement. Ce périple, il doit le faire avant de s’installer avec Sally, pour se rassurer aussi. Se nourrir des rencontres faites sur des aires d’autoroutes, des quais de gare ou par hasard, il va obtenir des réponses certes, mais aussi des « confirmations » qui feront qu’il est vraiment convaincu maintenant : Sally en étant son point de départ sera  à l’arrivée, elle est son amour mais aussi la maison, les aubes et les crépuscules, les nuits qui l’attendent. Avant d’en arriver là, de réflexions en marches mélancoliques, il repense à son enfance toute pourrie mais qu’il ne sert à rien en  devenant adulte de traîner indéfiniment ou d’exhiber comme un boulet, de toutes façons, nous apprenons à vivre avec nos pertes et nos deuils… Dans la vie c’est la naissance, (la renaissance aussi) qui est toujours la plus forte. Il constate en arrivant au Rocher de Gibraltar qu’il n’est pas la peine d’aller plus loin : où il plonge vers l’Afrique, ou il fait demi-tour.  » Des millions de tonnes de marchandises et d’humains sont en transit ici. Mis à part le bleu profond du ciel et de l’eau, la couleur qui domine est celle de la rouille. (…) elle s’assoit sur le trottoir, déboutonne sa robe et donne le sein à son bébé. Walther est subjugué par cette scène. Il a envie d’être celui que cette famille attend.« 

C’est un Monet de l’écriture ! Par petites touches dans ces courts paragraphes, des nymphéas nous explosent au visage, il nous emmène loin tout en nous ramenant au quotidien banal d’un couple qui a la joie (et les nuits blanches) d’accueillir un enfant. Tout est plutôt dans la suggestion poétique que dans une classique narration mais qu’est-ce que c’est beau ! Et la façon dont l’enfant les soude (ils pourraient s’écharper quand il faut changer la couche) est délicate, tendre, dans un respect de l’autre en totale harmonie avec leur amour,  à ce qu’ils représentent l’un pour l’autre en tant qu’humains… Tout en sachant que le temps ne fait pas de cadeaux et qu’il faut attraper les petits bonheurs indicibles quand la chance les fait s’arrêter sur le seuil de la maison. Là, on sait que leurs cheveux blanchiront avec leur yeux… J’ai aussi beaucoup aimé ses rencontres de voyage, à commencer par Pec, le petit merle noir d’Ostende qui voyage sur son épaule, la vieille dame de Sète qui aurait pu être une compagne de route quelques années plus tôt mais qui regarde les autres partir en sachant parfaitement ce qu’ils ressentent, dans la complicité évidente qui règne entre ceux qui ont voyagé et voyagent encore. Même quand ils sont revenus. Avant son départ, il a assisté à la première échographie de Sally et je vous cite  le sentiment qu’il a éprouvé en voyant son enfant :  » Il y a des sortes de correspondances qui s’installent de cette façon. Arbitrairement, subjectivement, instinctivement. Il y a des tunnels entre l’espace et le temps et il arrive par hasard de tomber sur une de ces portes. Alors les rouages de notre petite mécanique intime entrent en résonance avec d’autres, plus lointains, plus vastes. » La deuxième partie du livre qui se passe « à la maison » est moins bien construite que la première mais tout aussi belle, ce petit bémol n’entache pas mon coup de coeur !

C’est un livre que je vais acheter pour pouvoir en grignoter des petits morceaux les jours de pluie…ou lors des longues soirées de juin que j’affectionne ! Un livre voyageur qui vient de chez Jeneen (ma regrettée) qui je le rappelle a fermé son blog le 27 janvier, ma korrigane préférée…:( , coup de coeur pour elle également. Anne aussi l’a lu,  aimé, et en parle avec ce tremblement dans la voix qui n’appartient qu’à elle … Encore merci aux Agents Littéraires de promouvoir les petits éditeurs et de nous faire découvrir des perles !

Appris sur le site de Alma Editeur : Thomas Vinau est né en 1978 à Toulouse et vit au pied du Luberon. Ce livre décidément original a une play-liste de 26 titres allant de Sigur Ros, Beethoven, Alpha Blondie en passant par Les Beatles et Brassens… Vous la découvrirez sur le blog de l’auteur, ICI, ou encore sur le site de l’éditeur (sus-cité !).

Il compte pour deux challenges, ma première participation au challenge Petit Bac d’Enna (partie du corps : les yeux et….les cheveux), Le Défi Premier Roman d‘Anne.

46 réflexions au sujet de « NOS CHEVEUX BLANCHIRONT AVEC NOS YEUX de Thomas Vinau »

  1. Tu sais me parler, tu emploies des mots de peintre. Ton billet est superbe. Chez Edith je n’avais retenu que le départ, la fuite et l’égoïsme, j’étais allée trop vite dans mon jugement !

    • Je ne suis pas très calée en peinture… je fais avec le peu que je connais ! En fait ce voyage est aussi une ode à sa femme et à son enfant : elle a su le laisser partir, ne l’a pas attaché mais il est revenu comme une évidence ! Il n’a jamais cessé de penser à elle ! Il a des mots qui te plairaient j’en suis sûre ! 😉 ♥

    • Edith, je sais tu avais fait un beau billet, complet, mais le fait qu’il avait laissé sa femme seule m’avait outrée ! et du coup comme je le dis, je n’ai retenu que cette idée.

      • Comme je te l’ai dit plus bas, il y a plus que ça ! Le départ est une étape… Mais pourquoi ne suis-je pas étonnée que ça t’ait choquée ?? 🙂 Bises mama mia ♥♥♥

  2. Coucou fleurdechouanne préférée, je profite d’une pause pour aller sur ton blog.
    Tu parles divinement de ce livre, j’adore ton billet (je mettrai un lien vers toi dès que possible…) j’ai noté des petites phrases de temps à autre, je me les relis…Contente que çà t’ait plu. Prends soin de toi. Biz ♥♥♥♥

    • Je suis trop contente de revoir un peu ta frimousse même en coup de vent et c’est mon quart d’heure « position assise » 😉 . Tu sais que je n’étais pas pressée de le finir tant je le savourais ? Je vais l’acheter du coup, j’ai besoin de savoir qu’il est là… Je prends soin de moi mais des jours très bof 😦 Bises ma korrigane ♥♥♥

    • Je prépare l’enveloppe pour Somaja dans ce cas !^^ Et je vais demander son adresse à Gwen (je dois l’avoir quelque part…) Merci. Il aura fait un beau voyage comme Walther…

  3. ton billet ne peut susciter que de l’enthousiasme, et je rearde ce livre avec plus d’intérêt qu’avant…merci pour ce partage ! bonne fin de journée !

  4. Ah tu en parles magnifiquement bien, que je suis contente que ce soit aussi un coup de coeur pour toi (j’aime bien que tu m’attribues ce tremblement dans la voix, c’est de l’amour, de l’enthousiasme, de l’envie d’être séduite encore et toujours par un livre ! Au club de lecture, elles parlent de mon petit soupir de plaisir en fin de présentation de coup de coeur 😉 Bon Jeneen a publié un billet depuis le 27, quand même, on la verra en pointilés, j’espère !

    • Petit soupir en plus à ajouter au portrait, c’est exquis !! 🙂 Pour notre korrigane, je crains fort que les derniers billets soient programmés et que ses visites s’espacent, noooon (cri du coeur )… Les pointillés c’est toujour mieux qu’un point final… 😦

  5. Je n’ai lu qu’en diagonale (oui, je suis très souple !) car il va arriver chez moi bientôt. Je suis sûre que je vais aimer si tout le grand ouest en dit autant de bien ;). bises de lèvres gercées sur tes joues anesthésiées par le froid. ♥♥♥

    • Miss Aqua-Yoga fait ses étirements ? Ne te retourne pas une côte à lire en diagonale hein ! 🙂 Il est prêt à partir chez toi, faut que j’aille à la poste et pour l’instant les trottoirs sont glissants… Eh oui le grand Ouest n’a pas de neige mais du givre… Même avec les gerçures, je prends le bisou ! Et t’en envoie un autre plein de buée rafraîchissante, effet Kiss-cool garanti ! 😆 ♥♥♥

      • « L’hôtipal qui se moque de la charité  » prend ici tout son sens ! 😉 Non, mais, tu n’as pas assez de t’occuper de tes propres côtes ? Allez, chère Vendéenne verglacée, reste au chaud chez toi et attends que les trottoirs ne soient plus le prétexte à répéter ton prochain spectacle et à nous voler la vedette à Jeneen et à moi ! J’attendrai pour voir mes cheveux blanchir…♥♥♥

        • J’ai envie de faire un bisou à ce commentaire si mignon ♥♥♥ 🙂 Pas trop le choix en ce moment mais je pense que tu le recevras avant d’être complètement chenue !!! (et moi momifiée dans la glace !^^)…Biiises ma pom-pom de choc !^^

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