
Les MOTS en A à placer étaient : allergie – astre – affriolant – arbre – anagramme – accident – artifice – abricot – abandon.
Le texte de Clara, ici, qui a publié jeudi ! Celui de Gwenaëlle, Eiluned, Amélie , sont venues s’ajouter Aymeline, Jean-Charles et Jeneen dans un conte à 4 mains avec sa fille ! Mais aussi celui de Coumarine. Après le mien ci-dessous, celui de Valentyne et celui de 32OCTOBRE. D’ailleurs, à ce sujet, bah oui, il faut s’organiser, pourriez-vous, pour celles qui ont des blogs m’envoyer vos liens le vendredi soir avant 22 heures si possible que je puisse les inclure dans mon billet ? Oui ? Merci pour moi ! Sinon, vous les laisserez dans les commentaires, mais je pense qu’il serait plus convivial et pratique de les regrouper autant que faire se peut…
MUSIQUE D’AÉROPORT
Aéroport 17h30. Elle est là comme tous les jeudis en bas de l’escalator, les yeux fiévreux qui fixent les passagers déversés par le vol AF732 en provenance de Boston. Légère dans sa robe d’été qui frôle sa peau hâlée, elle se laisse bousculer, balloter par la foule indifférente et pressée. Il va apparaître, elle le sait, il ne l’a pas abandonnée, pas comme ça sans un mot depuis deux mois ! Elle sort un abricot du pochon en papier qu’elle tient des deux mains comme une offrande qu’elle aimerait lui faire pour son arrivée. Elle le sait, il adore ces fruits juteux et sucrés. Elle tend l’oreille quand une voix d’hôtesse impersonnelle et suave annonce un retard sur un autre vol ; tous ses sens sont aux aguets, une douleur acide va et vient dans son ventre au fur et à mesure que les passagers se raréfient. Infiniment lasse, elle consent à s’asseoir sur un banc aussi transparent qu’elle est redevenue, Cendrillon sans carosse, et tente de penser avec cohérence : « Je ne veux pas que tu m’attendes lui avait dit Martial en partant. Je ne suis pas quelqu’un qui revient. Tu comprends ? Ce n’était qu’un accident ce qui vient de se passer entre nous, cela n’arrivera plus même si tu m’aimes. Continue sans moi. Retourne là-bas… » Et il avait disparu, happé par l’escalator. Elle se souvenait avoir fixé longtemps ce vide qu’il habitait encore , sa chemise blanche aux manches retroussées, ses cheveux blonds, un peu longs qui lui barraient le front, sa veste sur l’épaule, son regard vert qui s’éloignait déjà dans l’absence.
Là-bas… C’était le mas familial en Provence, les grands cyprès tristes qui le bordait, les silences du grand-père, sa main noueuse agrippée à sa canne, la peau translucide où fleurissaient des taches brunes chaque jour un peu plus, son allergie palpable dès qu’elle entrait dans la pièce, le regard détourné vers la fenêtre comme s’il cherchait à voir entre les feuilles de l’arbre, des morceaux de ciel bleu qui passaient en souriant. Elle ressortait aussitôt et lui se replongeait dans ses anagrammes ou ses mots fléchés en soupirant d’aise. Il n’était plus à un artifice supplémentaire pour lui pourrir la vie. Qui voulait encore s’occuper de ce vieux ronchon sénile ? Elle ? Elle n’avait pas eu le choix. Elle s’était échappée comme tous les mardis. Cela avait été plus facile que d’habitude, l’astre de la nuit s’étant fait la malle derrière de providentiels nuages. Le grand-père lui avait dit la veille que sa robe était…comment déjà ?… bien trop affriolante pour descendre au village. Elle avait souri en pensant » C’est parfait » !
Des heures de train plus tard, elle avait retrouvé la musique reposante du terminal B de l’aéroport. Elle aimait cette musique insipide qui la changeait des cris du grand-père. Elle ne bougeait pas, seule sur son banc, des rêves noyés d’attente et d’incertitude cognant derrière son front lisse et buté. Martial lui avait écrit, enfin il avait envoyé une carte bizarre où deux familles annonçaient son mariage à l’église Saint-Patrick de Boston, le 9 juillet prochain. Elle fronça les sourcils et réalisa qu’on était le 9 juillet. Une erreur d’adresse, une farce encore. Un rire la secoua brusquement, un rire qui cascadait et lui courait partout sous la peau. Elle tira sa robe remontée en haut des cuisses et en levant les yeux, poussa un cri étouffé tout en continuant de rire. Deux gendarmes et un infirmier venaient de l’attraper par les bras et lui disaient gentiment qu’il était temps de rentrer à l’hôpital. Elle jeta la poche d’abricots, essaya de s’enfuir mais l’infirmier lui enfonçait déjà une piqûre dans le bras. « C’est le grand-père, hein qui vous a tout dit ? », hurla-t-elle avant de sombrer.
LE TEXTE de Valentyne :
La suite de l’histoire d’Isabelle la ponette
Bonne journée
Valentyne
Isabelle, la ponette, a réussi son examen de passage auprès de Zire, la Sirène, et a répondu avec brio aux trois devinettes.
Zire lui annonce que cette nuit même elle partira faire le tour du monde.
A l’heure dite, Isabelle retrouve Zire près de la rivière.
– Où va t on, chère Zire ?
– Moi, je ne vais nulle part, répond Zire, je t’attends ici mais voici ton chauffeur qui t’emmène pour ta première escale. Grimpe sur son dos et profite bien de ton voyage !! Je te donne cette petite sacoche magique qui t’aidera en cas de difficulté. Comme je sais que tu es allergique aux abeilles, Isabelle, je t’ai mis un sérum au cas où tu te ferais piquer !
Alors après avoir salué Zire, Isabelle s’installe sur le dos d’Alpha, l’Albatros géant qui décolle sans effort avec la ponette bien calée à son bord.
– Nous partons pour les Antilles, dit il : direction Madinina
– Madinina?
– Oui Madinina, l’île aux fleurs plus connue sous le nom de Martinique
– Génial je vais pouvoir aller rendre visite à ma cousine, la ponette Josée
Quelques heures plus tard, après être passés près d’une multitudes de nuages aux formes plus étranges les unes que les autres et près d’astres scintillants de mille feux, Alpha et sa passagère se posent au milieu d’un champ d’ananas, non loin d’un flamboyant, véritable feu d’artifice de rouges, oranges et jaunes.
– Bonnes découvertes, lui souhaite Alpha, quand tu aura bien découvert la Martinique, sors de ta sacoche cet appeau et souffle dedans : un des amis de Zire viendra te chercher pour la suite de ton voyage.
Isabelle se met alors en route à son allure habituelle, : elle trottine, trottine, émerveillée par tout ce qu’elle voit : des champs de cannes à sucre, des bananiers en pagaille, des palmiers de toutes tailles: Sur le chemin elle rencontre un agouti, petit rongeur brun, qui lui paraît mal en point : une de ses pattes est dans une attelle de fortune et il avance en boitillant : « j’ai eu un accident : je me suis fait renverser par une voiture, peux-tu m’emmener à Trois Ilets ? » demande t il.
Oui, volontiers répond Isabelle, contente de rendre service, c’est là d’ailleurs que je vais pour visiter ma cousine Josée.
– Josée, mais je la connais bien, je peux t’emmener jusqu’à elle. Au fait je m’appelle Tigoua c’est facile à retenir , c’est l’anagramme d’agouti, c’est du verlan.
Et ainsi, trottinant à travers les champs, Isabelle la ponette et Tigoua l’agouti arrivent à Trois Ilets.
Tigoua lui montre des fruits et des fleurs qu’elle n’a jamais vus : « tu vois là bas ce sont des corossols, et là des pommes cannelles, toutes bosselées. L’arbre en éventail devant, c’est l’arbre du voyageur »
– Oh ces fruits là haut on dirait des abricots géants !
Enfin, les deux amis arrivent à Trois Ilets, chez Josée qui les acceuille avec joie.
– « Zire m’a fait prévenir de ton arrivée, Isabelle ». Josée, la ponette baie a mis son habit affriolant de Carnaval : un magnifique harnais rouge et or qui fait ressortir sa robe foncée. Le licol est vermillon, les rênes magenta. Chaque fois qu’elle secoue la tête, on entend des clochettes, à en rendre jaloux les rennes du père Noël.
– Je me suis faite belle en ton honneur Isabelle. On ne dira pas que Josée-Fine de Beau-harnais ne fera pas honneur à son nom. Mais tu dois être fatiguée , viens te reposer. Demain je te ferais découvrir l’île .
Alors Isabelle, épuisée par toutes ces émotions et par le décalage horaire, sombre dans l’abandon d’un sommeil réparateur.
TEXTE DE 32 OCTOBRE
Les jardins de l’Anagramme.
Malgré l’astre brûlant qui allait me cuire, je me décide à aller travailler à mon potager. Trois jours que je n’y étais pas descendu, victime d’une allergie au pollen de graminées très nombreuses en cette saison.
Ce potager, le seul qui a, en son milieu, un arbre, je l’ai obtenu de haute lutte. Et en plus cet arbre m’offre mon fruit préféré, l’abricot.
Au départ, un lopin de terre vierge de toute culture mais pas d’herbes dites mauvaises ou folles. Il fait partie des jardins ouvriers de la ville où j’habite. Un des vingt carrés de terre attribués par les services sociaux de la ville.
Ce coin de paradis a été laissé très longtemps à l’abandon.
Mais c’est de l’histoire ancienne, déjà vieille de plus de dix ans.
Je venais d’être victime d’un accident assez risible car dû à ma maladresse. Toujours pressé, je m’étais pris les pieds dans la laisse de mon chien que je descendais pour sa promenade biquotidienne. J’étais tombé dans l’escalier de mon immeuble et avais les deux jambes cassées et les bras droit. Au minimum neuf mois d’immobilisation, un enfer programmé pour l’homme actif que j’étais.
Donc je m’étais inventé plein de projets pour l’après. Cela m’occuperait au moins l’esprit pendant ces longs mois d’immobilisation.
Le projet qui me tenait le plus à cœur, avoir un coin de jardin à moi, obtenir un des jardins ouvriers de ma ville et en plus celui à l’abricotier.
Six mois s’étaient passés depuis mon accident, et comme par artifice, j’ai obtenu un jardin ouvrier, moi qui étais à ce moment là cadre et non ouvrier dans la seule entreprise industrielle de la ville. Un passe-droit dire certains. Quelles mauvaises langues !
Je ne pouvais y travailler étant encore très handicapé mais j’avais obtenu ce que je voulais : le principal, mon petit lopin de terre.
Dix ans que je l’entretiens et y récolte ces vieux légumes retrouvés et que j’y ai enterré virtuellement mon secret qui commence à me peser.
Et si je m’en libérais : pour obtenir ce jardin, j’ai juste un peu menacé Monsieur le Maire de l’époque. Notre belle amitié s’était évanouie tout d’un coup.
Je pouvais juste révéler sa tendre complicité avec une certaine Charlotte, infirmière de son état et très affriolante qui s’était occupée de moi pendant mon hospitalisation.