
Logo du jeudi poésie pour présentation d’un poète.
L’automne, en septembre nous est arrivé dans les bras de l’été, encore chaud et ébouriffé de soleil, laissant à octobre le soin d’enluminer les arbres. Novembre est encore doux chez moi, les feuilles jonchent l’allée du jardin et comme en poésie, je suis souvent à contre-saison, je vais vous livrer un passage de Noces d’Albert Camus, extrait d' »Un été à Alger », un livre de courtes nouvelles, que je relis régulièrement parce qu’il me parle personnellement mais surtout parce que sa beauté est universelle même si les choses décrites par Camus dans les années 1930 n’existent plus depuis longtemps, les paysages eux sont restés. Et puis Albert Camus n’écrivait pas pour « faire de la poésie », son écriture est poétique…. D’ailleurs j’ai eu du mal à choisir un extrait plutôt qu’un autre.
Ont poétisé avec moi les inconditionnels :
1 – Martine nous emmène découvrir la poésie grecque avec : Kikí Dimoulá : « Statue de femme aux mains liées », extrait du recueil « Le Peu du monde, suivi de Je te salue Jamais »
2 -Sharon, depuis que Bob Dylan a eu le Nobel de Littérature nous offre de jolis poètes-chanteurs et aujourd’hui c’est Mathilde de Jacques Brel ! Le Grand Jacques aurait pu l’avoir ce Nobel…
3 – Soène s’est blottie contre Albert Samain et nous dit « Je rêve de vers doux »…
4 – Modrone-Eeguab, de retour d’Italie a justement rencontré Musset (Alfred de) qui lui a parlé de « A mon frère revenant d’Italie » (le hasard fait bien les choses)…
5 – Valentyne, notre Jument Verte préférée, se remet en selle avec « Diego » de Sabine Sicaud. Au galop !
6 – Jacou, la bordelaise…nous présente « Bordeaux » vu par Ausone.
7 – Célestine nous raconte « l’ivresse » selon Baudelaire…
8 – Pativore, dont le commentaire s’était glissé dans Indésirables (et que je n’ai vu qu’aujourd’hui samedi)…nous glisse un poème d’Oscar Wilde.
Extrait de » L’ été à Alger », p. 39 à 41 de mon édition Folio.
« Soirs fugitifs d’Alger, qu’ont-ils donc d’inégalable pour délier tant de choses en moi ? Cette douceur qu’ils me laissent aux lèvres, je n’ai pas le temps de m’en lasser qu’elle disparaît déjà dans la nuit. Est-ce le secret de sa persistance ? La tendresse de ce pays est bouleversante et furtive. Mais dans l’instant où elle est là, le coeur du moins s’y abandonne tout entier. A la plage Padovani, le dancing est ouvert tous les jours. (…) Le soir venu, je ne voyais plus son corps collé contre son danseur, mais sur le ciel tournaient, les taches alternées du jasmin blanc et des cheveux noirs, et quand elle rejetait en arrière sa gorge gonflée, j’entendais son rire et voyais le profil de son danseur se pencher soudain. L’idée que je me fais de l’innocence, c’est à des soirs semblables que je la dois. Et ces êtres chargés de violence, j’apprends à ne plus les séparer du ciel où leurs désirs tournoient. »
Je ne peux pas résister à ajouter celui-ci, extrait de « Noces à Tipasa » et qui a donné son titre au recueil. p.17.

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Un peu avant midi, nous revenions par les ruines vers un petit café au bord du port. La tête retentissante des cymbales du soleil et des couleurs, quelle fraîche bienvenue que celle de la salle pleine d’ombre, du grand verre de menthe verte et glacée ! Au-dehors, c’est la mer et la route ardente de poussière. Assis devant la table, je tente de saisir entre mes cils battants l’éblouissement multicolore du ciel blanc de chaleur. Le visage mouillé de sueur, mais le corps frais dans la légère toile qui nous habille, nous étalons tous l’heureuse lassitude d’un jour de noces avec le monde. »
©Albert Camus, extrait de Noces – 1938 –.