C’est quand une femme meurt que les hommes pleurent. C’est ce qui arrive au narrateur. Paule, son amante, sa compagne est morte et il compte les jours pendant lesquels le bonheur ressemblait à une évidence. Il sait qu’il doit franchir l’immense haie du deuil pour ne plus souffrir autant. Il décide de fuir les lieux où ils se sont aimés, ces lieux qui lui rappellent Paule, l’amour, la vie et le bonheur perdus : « Le paysage s’est ouvert aux massacres. J’ai découvert combien il y avait peu de grâce au vide. »
Il décide de s’arrêter à Feil, petit village sur la Meuse, le temps qu’il faudra. Il trouve une logeuse et après avoir acheté trois cahiers « Conquérant », il pousse la porte d’un bar, essentiellement peuplé d’hommes âgés, retraités qui viennent jouer aux cartes et boire. Pour boire, il n’est pas le dernier et s’enivre souvent et échange peu de mots avec son nouvel entourage. Ces taiseux le soutiennent instinctivement et peu à peu une complicité quasi muette s’installe. Et il commence à écrire.
Paule n’est pas la seule à emplir ses souvenirs douloureux. Sa mère, une putain qui ne souhaitait pas d’enfant s’immisce dans ce champ de ruines et il se pose des questions sur qui pouvait bien être son père parmi les amants (maquereaux serait plus juste) de cette mère haïe. « Nous possédons tous, très loin dans la nuit de notre pensée, un abattoir qui pue. »
Peu à peu le souvenir de Paule devient moins obsédant, il boit moins, écrit davantage mais se rend à l’évidence, il lui faudra apprendre à vivre dans l’absence, « dans l’incontinuité de Paule ». Même si, à la fin, « une promesse rousse » lui permet d’espérer en des matins qui chanteront à nouveau, il sait que ce sont des matins encore lointains. La Meuse, dans le brouillard de l’hiver a amorti les chocs et les sons mais le printemps revient toujours et alors il faut affronter le monde. Bien que : « La nuit a pris le relais, et avec elle la théorie des grands rêves, ceux qui reviennent avec la constance du bourreau dans les heures mal assurées de ma vie. »
La poésie de Philippe Claudel se marie ici à une douleur aveugle, le deuil ne se faisant pas en un claquement de doigts. Seul le temps permet d’accepter l’intolérable et adoucit les aspérités. Je suis définitivement conquise par la plume de cet auteur qui signe ici son premier roman. Certains ont dit qu’il avait les maladresses d’un premier roman, je l’ai trouvé bouleversant de bout en bout. Après « La plus que vive » de Christian Bobin qui traitait d’un sujet identique, me replonger dans une histoire de deuil n’a pas été facile mais le style de l’auteur, sa pudeur, sa poésie m’ont cueillie dès le départ et je n’ai pas vu passer les 158 pages du roman.
Ici, le billet de LiliGalipette qui m’avait séduite et tentée, bien sûr…
Une participation pour le « Défi premier roman » de Anne et une autre pour celui de Laure « Challenge à tous prix » puisqu’il a obtenu le Prix Eckmann-Chatrian en 1999.
Oh la la, que ça a l’air triste.. Et comme j’aime beaucoup la plume de Philippe Claudel je sens que je vais être très touchée par cette histoire. Je suis peut-être maso, mais je note ce titre.
Natiora, je confirme : c’est très triste et là, ce n’est pas Bobin qui trouve toujours une forme de joie à la mort, non, on est dans le désespoir total, avec quand même une lueur à la fin mais bon… Comme toi j’adore sa plume, je peux lire n’importe quoi de lui je crois ! Comme Gaudé d’ailleurs…
Si l’auteur laisse une fenêtre ouverte sur la vie, le roman me plaira. Noté !
Syl, il n’a pas eu le courage de se suicider, il le dit lui-même alors oui, dans ce contexte il y a de l’espoir mais ne t’attends pas au Happy end des romances !!! 😆 Bises
Lili séductrice, à votre service ! 🙂
Lili, j’ai un an de retard sur toi (dans le meilleur des cas^^) mais je finis par y venir … 😀 Vilaine !!!^^
Des tentations de cette qualité, tu peux, je baisse les bras, je ferme les yeux et je t’obéis !!! 🙂
J’adore qu’on me dise ça !
Lili, je peux te le redire encore et encore !!! 😆 Fraise ou vanille ???
Euh… chocolat/pistache !! 🙂
Lili tu es une petite gourmande ! 😀 Tu sais bien que je ne peux rien te refuser !!! Va pour la pistache, je n’en ai pas mais je vais en trouver…
Ah non,tu ne trouves rien et tu n’envoies rien ! Je te l’interdis !!!
Lili : tss tss, cause cause, je vais chercher pendant ce temps !!! ♥
que tu en parles bien… j’inscris…Je vais devoir trouver un mécène pour un budget livre…et pourtant j’ai déjà une bibliothèque bien garnie avec un prof de lettre à la maison…
j’ajoute et guetter la médiathèque
avec le sourire
Lilou, ne me parle pas de budget, ça me donne des boutons !!! 😆 Il y a de bonnes occasions sur Pr***e Mi*****R, dans les cas d’urgence extrême !!! 😀 J’imagine que ta bibliothèque ne doit pas être famélique ! 😉 Je te recommande vivement ce livre même s’il y a mieux pour le moral, il est très bien écrit !
Je le trouve très bon pour le moral, ce roman, une fois qu’on l’a fini ! Beaucoup d’espoir !
Lili, tu trouves ? Certes il recommence à entrevoir une possibilité d’espoir mais globalement ce n’est pas gai !!! Ce n’est pas ce que j’allais y chercher de toues façons mais contrairement à Bobin qui transforme sa peine en une sorte de « joie », lui, entre sa mère et Paule, il est quand même meurtri à vie dans sa chair…
Cette région de France est chère à l’auteur,une région discrète et souvent mal-aimée.Je n’ai lu qu’un livre de Claudel mais ton billet me donne envie de m’y intéresser davantage.A bientôt.
Claude, j’ai vu qu’il était né en Lorraine et qu’il y vivait encore !J’y suis passée une fois étant gamine, je n’en garde pas un souvenir ébloui certes, quand on y est né c’est différent ! 😉 Et il faut que tu lises ce livre, je suis presque sûre que tu vas aimer…
Rhalala il faut absolument que je le lise !!! en plus j’en ai 3 dans ma PAL !! gloups 😆 C’est marrant je me disais que ça portait sur le même thème que La plus que vive et tu en parles 😉 celui-là aussi faut que je le lise… j’en ai TANT à lire grrrr jamais ma vie suffira… mais bon c’est ainsi 😀
Très bel article encore une fois 🙂
Laure, je crois que, quand on perd la personne que l’on aime, écrire devient une nécessité, je ne dis pas que c’est autobiographique, ce n’est dit nulle part mais il a dû vivre une chose qui y ressemble pour en parler comme il le fait ! Rien à voir avec Bobin cependant, deux styles complètement différents mais je préfère Claudel, de loin ! 😉
ah !!! mais ça me donne encore plus envie de le lire ce que tu me dis là !! le fait que tu trouves meilleur son écriture que celle de Bobin 😉
Avec tous ces bons conseils je ne vais finir que par avoir des billets coup de coeur moi ! 😆
Laure, ça c’est personnel le fait que je préfère ! Ca ne se contrôle pas ! Disons que je pense que Ph. Claudel est meilleur sur la « distance », il est capble d’écrire des choses très différentes en gardant un style qui lui est propre alors que Bobin est un peu cantonné aux « fragments », c’est le maître des aphorismes mais il écrit souvent la même chose et dans des formats très courts !!! 😆 Tu te feras ton opinion dès que tu pourras et nous en reparlerons !!! 😀 Bises
Moi aussi, ton billet me donne envie de lire ce livre … Je crois qu’il va me plaire. Merci Asphodèle.
Yorlane, hi, tu me diras s’il t’a plu, si tu as l’occasion de le lire ! 🙂
J’aime beaucoup P. Claudel, même si c’est d’ombre et triste , j’avais adoré les « Âmes grises » il sait rendre le glauque poétique ! Il est l’un des seuls je trouve ! Je note la Meuse !
Pour l’instant je n’ai rien lu de gai de lui mais j’adore !Et « Les âmes grises » est dans mon carnet, il ne va pas y rester longtemps, je sens que je vais craquer !!! 🙂
Ne craque pas pour « les âmes grises ». Stp.
Béa, je crois que j’ai compris le message !!! 😆 Mais si je ne tiens pas jusque là, je te le dirais ! Heureusement, le Salon va faire diversion ! Gros bisous ! 😀
Sombre et pas d’ombre!
Je hais l’écriture intuitive
Sous les galets, j’avais compris même si finalement, je le trouve pas mal du tout ton lapsus !Très poétique ! 🙂
ça semble sombre, mais très beau ! Je note !
L’Irrégulière, je suis persuadée que tu aimerais !!! Ha au fait, j’aurais pu le mettre dans le challenge amoureux dans la rubrique « amours perdues » … Je vois ça demain !
je n’ai pas encore lu cet auteur pourtant plutôt « excellent »
Denis, vraiment, je pense qu’il va devenir un grand écrivain incontournable d’ici quelques années ! Je regrette d’avoir mis un an avant de me décider, ça prendra moins de temps pour que je lise TOUT de lui !
Je prends note pour Sharon. Elle vient de rentrer de Paris et elle est un peu fatiguée.
Nunzi, c’est bien que tu sois gentille avec Sharon après cette rude journée !!! Un câlin du soir très chaleureux !!! 🙂
J’ai l’impression que le thème de ce roman a un lien avec le magnifique Les Âmes grises. Je vois que tu ne l’as pas lu donc je n’en dis pas plus, mais quand tu l’auras lu, tu constateras que les deux narrateurs sont très proches, l’histoire de l’un prolongeant l’histoire de l’autre. D’ailleurs, j’y pense, dans le rapport de Brodeck, le narrateur souffre aussi pour sa compagne. Je n’ai pas lu celui-ci mais je le note, il a l’air très beau. À bientôt !
Nath non je ne l’ai pas lu, je l’attends avec impatience mais j’ai lu « Le café de l’Excelsior », un court roman de 93 pages très émouvant, cet auteur sait jouer sur mes cordes sensibles !
Ma binomette chérie profite bien de ton escapade ! Bisous et n’oublie pas de faire un câlin à marcus Malte de ma part. Somaja a la même mission ! SInon je n’ai pas lu Meuse l’oubli je vais me dépêcher de le faire apres un tel billet!!!!!! Bisous bisous
Ma Comète préférée, on va essayer de rester en contact malgré tout hein !! Je suis sûre que tu vas adorer Meuse l’Oubli ! Je te fais de gros bisous ma binômette !!! 😀 (Le câlin à Marcus est compromis, j’aimerais le voir mais je ne suis pas une groupie, je n’aime pas attendre une heure ou faire la queue pour une dédicace, on verra sur place comment ça se passe !^^)
Je ne connais pas cet auteur et pour le découvrir je ne choisirai pas ce titre. Ou bien alors juste pour comparer avec La plus que vive que j’avais trouvé l’écriture trop artificielle et forcée.
Lorsque l’on est confronté au deuil d’un être cher, il faut continuer à vivre, autrement. Ca demande, j’en suis consciente, un immense travail sur soi et une grande force de caractère.
« Seul le temps permet d’accepter l’intolérable et adoucit les aspérités ». C’est aussi ce que je pense.
Bon dimanche et bisous d’O.
Soène, pourtant il est beau ce livre, rien à voir avec Bobin même si le sujet est le même ! Il est beaucoup plus sobre, ce qui n’enlève rien à sa poésie, j’ai vraiment adoré ce livre, j’arrête de mettre « coup de♥ », vous allez dire que j’ai un coeur d’artichaut 🙄 !!! Je crois que Gaudé et Claudel sont mes deux révélations de ces dix dernières années, tu vois ça va loin !!!
Bon dimanche et bises♥
Un sujet que je vais éviter pour le moment.
Alex, tu as raison, ce n’est pas la peine de se faire du mal avec certaines lectures ! 😉
On retrouve les thématiques du café de l’Excelsior…la boisson, la perte d’êtres chers, le Nord de la France…cela me donne envie de me replonger dans ses mots…je le ferai plus tard…
Mind, c’est quand même tout à fait différent mais son style est toujours aussi beau !!! Fais-le quand tu le sentiras…
recoucou
je passe mon tour à cause du « désespoir total » . Y-a-t-il un livre pas trop désespéré que tu conseilles de cet auteur?
bises 😉
Val, il y a quand même une lueur d’espoir à la fin, mais trop triste pour toi !!! Cependant, je suis certaine que tu adorerais son style !! Et ce n’est que mon 2ème, le prochain sera Les âmes grises en ce qui me concerne, peu importe que ce soit gai ou triste, ce sera du Claudel ! 😉