Danse avec les stars…

Je sais d’où je viens, je n’ai pas oublié  les trottoirs boueux de ma banlieue romaine alors, vous savez, je sais où je vais et j’avance droite sur mes talons vertigineux. Ce soir j’ai revêtu mon fourreau lamé rouge à décolleté pigeonnant, celui qui met si bien mon teint et mes yeux en valeur. Pas que… Je suis belle et déjà célèbre en Italie, mais Hollywood me tend les bras, ça ne se refuse pas !

Ce soir Howard Hughes donne une party, il vient de m’envoyer une limousine avec chauffeur, il n’attend que depuis une heure, je suis dans les temps,  je fais durer le plaisir et me repasse une couche de ce rouge à lèvres que Mademoiselle Chanel  nous envoie de Paris, une merveille créée pour les studios. Voyons… ce soir il y aura Rita (Hayworth), toujours aussi sensuelle malgré ses trente-huit ans, la pauvre, elle vient de se séparer de l’Aga Khan et on dit qu’elle a commencé à boire. Elles boivent toutes ces américaines, regardez Marlène, qui sera affalée comme d’habitude sur son fauteuil, ça fait bien longtemps que les ailes de l’Ange Bleu ne font plus d’ombre à personne.

Je vais devenir célèbre dans le monde entier après ce film avec Humphrey Bogart, comment déjà ce titre stupide ? Ah oui : « Plus fort que le diable », mamma mia, Dieu me le pardonnera et je brûlerai un cierge à la Madone dès mon retour, les églises ici ce n’est pas pareil.

J’y vais. Le chauffeur n’a rien dit, bien dressé ce jeune homme mais j’ai refusé le champagne mis à ma disposition pendant le trajet, je le laisse à cette écervelée de Marilyn qui occupe tout l’écran en ce moment avec sa blondeur niaise et sa voix de chatte désespérée, c’est navrant ! « Les hommes préfèrent les blondes », voilà qu’on lui fait même des titres sur mesure, heureusement Jane Russel est là pour laver l’affront.Qu’elle est belle la maison d’Howard ! Ils copient nos colonnes antiques, pff, c’est ridicule mais ça en jette comme ils disent. Je vois ma Gilda bien proche d’Howard ce soir… On dit que… mais je le crois maintenant. Oh non ! Cette jeune oiselle de Grace Kelly est là ! Avec ses airs de nonne échappée d’un couvent, quand on sait qu’elle couche à tout va, mais Hitchckok ne jure que par elle…bien sûr. Je souris à Cary Grant (il faut rester polie), je les regarde, il ne me voient pas encore, perdus qu’ils sont déjà dans leur danse macabre, ils brûlent leurs vaisseaux sans penser à demain, mais voilà ce que je leur dis ce soir dans la fumée des cigares, dans les vapeurs d’alcool qui les isolent du reste du monde, voilà ce que je dis ce soir à la terre entière :

 « En haut des affiches de cinéma,
en lettres bienveillantes,
Et surtout scintillantes,
mon nom se déploiera,
on oubliera vite Luigina,
et seule restera… Lollobrigida ! »

Ma participation à l’atelier d’Eiluned « Rendez-vous avec un mot » et cette semaine, il s’agissait du mot Danse. (Photos pages d’accueil de Google).